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imprimer cet article LECTURE ET COMPRÉHENSION
Conscience du handicap (suite)
LES LIMITES...
mercredi 31 décembre 2008, par J Zwobada Rosel


Qui pose les limites de l’intervention thérapeutique ? Artus nous invite à réfléchir à ce que nous "testons" en fait de lecture.

En réponse à la question posée par une collègue orthophoniste "j’aimerais savoir comment vous faites pour différencier ces 2 lectures, Lecture à haute voix versus lecture silencieuse, lors de vos bilans ? et en séance ?"

Bonjour Hélène

Vous soulevez là un réel problème. Surtout par rapport à des enfants suivis en rééducation... à qui bien sûr nous n’apprenons pas seulement à différencier ces lettres/sons et leurs variantes qui relèvent de la conscience métaphonologique, mais à construire du sens, en lâchant ce à quoi ils s’accrochent car lire c’est, pour une bonne part pour eux, lâcher prise pour aller à la rencontre de l’autre dans sa version forme et sens des informations qu’il apporte. Et ils résistent...

Pour ma part j’utilise les vieux tests et pour l’évaluation de la compréhension, "Une curieuse aventure" pour la lecture silencieuse (A G-B qui utilisait le Bond pour la compréhension) parfois, et d’autres supports issus de fiches de travail, Hullul et/ou Le grillon et le mille patte, les plantes carnivores ou tout simplement le petit livre que l’enfant choisit pour évaluer dans le dialogue sa façon de ne pas comprendre en lecture à haute voix. Je sais qu’il y en a d’autres, je les ai consultés... mais étant à la retraite, n’ai plus guère de bilans...

Ce qui m’interroge davantage c’est comment l’enfant dys entre dans une démarche de compréhension (cf. d’autres modalités de travail témoignage d’enseignant spécialisé) donc de séance en séance.

àmha [1], si on reprend point par point le problème que nous rencontrons dans notre évaluation (on peut discuter d’autres façons de l’aborder bien sûr), assemblage et adressage sont entre-mêlés pour rendre compte de ce qu’on appelait dans le temps les différentes sortes de paralexies mais ce n’est que l’écorce de ce qui permet de comprendre ce qui bloque la compréhension, car on peut lire un mot de travers à haute voix (comme un lapsus) et comprendre, le signe à double face chez Saussure St/Sé résultant d’une construction laborieuse jusqu’à l’adéquation du rapport dans nos populations dys. Je me suis toujours battue avec mes collègues linguistes en posant cette hypothèse de travail issue de mon analyse de ma pratique.

Tout le monde achoppe sur le problème de la compréhension et nous en avions longuement débattu en 2000 sur une autre liste, plutôt d’enseignants... cf. Vitesse de lecture et compréhension

Je termine un article pour cette rubrique mais c’est très compliqué (sauf pour Foucambert et Khomsi, voire Gombert qui posent des concepts heuristiques) car je ne cherche pas à l’évaluer avec des tests à choix multiple ou sous forme d’énoncés Vrais ou faux, ni en hyperlexie... mais je tiens compte de l’évolution de l’apprentissage avec les formes de difficultés rencontrées pour la forme, qui permet de lire (apparemment), et du dialogue avec l’enfant pour vérifier ce qu’il comprend de ce qu’il a réussi à lire, après lui avoir fait dessiner les premières situations des premiers énoncés, pour que cette démarche de compréhension soit associée par la suite par une mise en image. La mise en image figurative peut en effet entrer en conflit avec une forme plus intuitive de saisie du sens. A suivre donc.

Un jeune trisomique que je suis depuis la sixième (il a bien,tôt 20 ans), Artus, m’a fait vivre une situation bouleversante [2] hier, je suis allée trop loin et il me l’a dit avec ses mots, dans le système de compréhension de son fonctionnement mental que nous avions posé ensembles. Dur rappel à la réalité et fort sentiment de culpabilité de l’avoir bouleversé ainsi. Le plus souvent je le laisse libre de choisir son activité, ce qui surgit souvent de notre échange préalable sur la semaine écoulée ou qu’il pose d’emblée. Il adore dessiner, le réclame très souvent : il élabore en dessinant (cf. la série de trois articles). Il sort d’ailleurs du dessin primitif dans la représentation de lui-même de dessin en dessin, il se situe dans sa relation au monde, déplace l’élément stéréotypé etc... Cependant, il m’arrive de me sentir très orthophoniste et de vouloir préciser la forme de son expression (cr/tr, agrammatisme etc...) qu’il peut corriger mais ne met en pratique spontanément que dans des situations "figées", énoncés tout faits etc...

J’utilise avec mes ados "les goûters philos" et je lui demande d’en choisir un pour faire un exercice de lecture qui améliorera sa diction car il lit très bien. Il choisit “Libre ou pas libre”, thème dont nous avons souvent débattu avec des mots accessibles, à partir d’une situation concrète de son expérience vécue. Et voilà que je me mets à faire ce que je fais avec les DL/DO, vérifier ce qu’il a compris des situations évoquées... Il a beau me dire qu’il ne peut pas, j’insiste en pratiquant mon étayage verbal habituel qui recontextualise la situation, il me dit alors "trop de mots" avec l’expression d’intense souffrance qu’il a quand nous abordons, à sa demande, le thème du regard de l’autre et des moqueries dans les transports en commun ou à son EMP, ce qui m’amène à lui proposer de dessiner moi-même pour l’aider à comprendre la situation évoquée à partir d’un exemple différent qui me semble plus accessible sur le partage d’un espace pour qu’il puisse me le restituer en le reformulant ce qu’il a lu. Je dessine et nous retrouvons les deux situations du texte, mais il souffre de tous ces déplacements que je lui impose. J’ai l’idée aberrante, comme si je n’entendais pas sa souffrance, de poursuivre pour les deux autres exemples, plus abstraits encore.

Son expression de souffrance s’accroit si cela est encore possible
-  (c’est de "l’acharnement thérapeutique" comme je l’ai fait avec certains dyslexiques qui m’ont dit en retour que cela leur avait été nécessaire cf. Yvan),
il cherche ses mots et me fait comprendre sa différence, la violence que je lui ai faite (ce n’est pas les autres cette fois, mais bien moi) avec ses mots de ne pas avoir accès à mes mots " tous les mots... trop de mots..." et, la tête pressée entre ses mains, traits contractés, avec une intense souffrance :

"MON CERVEAU A DES DIFFICULTES, IL EST DETRUIT" et il se met à parler des "MANIFESTATIONS", lui il ne manifeste pas (je glisse : avec les lycéens), il n’est pas comme eux, il ne manifestera pas, il ne veut pas les manifestations... et finit sur ces mots tellement révélateurs de la souffrance de son hyperconscience de ses limites (je vous avais sollicités dans un ancien message sur "conscience du handicap") :

"LA RAGE DE MON FRONT C’EST L’ESPRIT" et poursuit un peu après "AVEC LES MOTS DIFFICILES" tout comme il avait dit "MOI HUMAIN HANDICAPE TRISOMIQUE".

C’est bien là que réside sa révolte. Il est parti chez lui, la main sur le cœur, seule valeur dont il est sûr dans notre construction conceptuelle de son univers.
Emotionnellement, il m’a évoqué ma lecture actuelle de "l’enfant bleu" de Henri Bauchau (grand merci Pascale de m’avoir ouvert cette piste), ce qui pose bien le problème de ce qui se passe derrière l’apparence...

Il est parti bouleversé, je l’ai rassuré car il se récupère habituellement en écoutant de la musique, ce qu’il m’a confirmé 2 heures après quand je l’ai croisé en bas de la cage d’escalier alors qu’il m’apportait le cadeau que ses parents ne manquent jamais de m’offrir en fin d’année dans un étui qu’il avait lui-même fabriqué.
-  Ai-je le droit de le faire souffrir ainsi ? au nom d’un "progrès" ? il me supplie de n’être là que pour le soutenir, au jour le jour, sans autre projet que le sien qui est de vivre comme il est, sachant qu’il ne pourra aller au delà...
Quel cadeau Artus m’a fait là, me rappelant que notre "pouvoir" rencontre le respect des "limites" de l’autre... et combien l’émotionnel doit être pris en compte pour les définir.

Un si long message mais le sujet est, àmha, au cœur du sens de notre intervention.

Jacqueline

PS Vous pouvez laisser un commentaire sur le blog de sos. Une discussion est amorcée dans l’article "conscience du handicap (trisomie). Merci de donner votre point de vue ou d’apporter votre témoignage.


[1] à mon humble avis

[2] Il avait déjà eu ce type de réaction à propos des limites de ses capacités physiques avec son prof de gym à la psicine


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Thèmes abordés :
- Conscience
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Les mondes parallèles d’un trisomique (2)
Les mondes parallèles d’un trisomique (1)
limites




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