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EVOLUTION DU JEU SYMBOLIQUE Une séance avec Yann LE JEU DES PULSIONS vendredi 2 février 2007, par J.Zwobada Rosel Le premier "jeu symbolique" que j’ai réalisé moi-même et la réaction de Yann à ce jeu auraient été le déclencheur d’une évolution qu’on retrouve dans l’évolution de ses dessins au cours de l’année qui a suivi. S’ils figurent l’évolution de sa perception du monde et de l’autre, la dynamique de leur mouvement même ne serait pas sans lien avec le balancement qui resurgit parfois, évocateur d’un état de transe... Comment l’aider à réintégrer un monde de communication où le langage participe à la gestion de la violence des affects ? Le contexte Où en est-il dans son développement ? • Au niveau de son expression verbale, le langage de Yann, bientôt 12 ans, a beaucoup progressé, spontanément, intégrant des énoncés qu’on aurait pu penser « récités » tellement ils sont quasi parfaits, identifiables et adéquats à la situation, lorsque sont arrivés les salutations et certains commentaires, qui semblaient « habités » émotionnellement. Il a ainsi pris en compte et intégré la dimension pragmatique du langage. Lorsqu’il est hors situation, le rituel de l’embrassade /salutation prend alors la valeur d’-un signe- indiquant que j’ai compris quelque chose qu’il n’arrivait pas à exprimer, et que je répondais ainsi à son attente de reconnaissance par l’autre (pour ma part je serre la main en félicitant mes patients quand ils ont surmonté ou découvert quelque chose...)... Ces rituels quelque peu dé-ritualisés en changeant de contexte, retrouvent la dimension émotionnelle qu’ils avaient au départ (cf. compte rendu des années précédentes). • Il déteste répéter pour mettre en place articulation et syllabes qui se bousculent dans sa parole, dans un langage référentiel. Cependant, sa fascination pour les Pokemons permet d’utiliser leur nomination comme support d’essais et erreurs dans des jeux qu’il invente, où il actualise ses acquis, en particulier dans le champ des mathématiques. En effet, il commence à apprendre ses lettres, les nombres, tout en progressant dans le champ de l’organisation spatiale, la réalisation d’une continuité en tenant compte de l’orientation des éléments entre eux dans une relation qui déborde un rapport de contiguïté (cactus), et les contraintes de la logique avec des jeux, en particulier d’ordinateur (sériation, intrus etc...). Il n’est pas "docile" et les négociations se terminent le plus souvent en fin de séance par une photocopie de ...pokemon pour sa collection. • Nous avons mis en place non seulement la musique/spectacle, mais un travail sur la voix qui lui permet à la fois de se « défoncer » mais aussi de contrôler sa production vocale dans un jeu où nos voix s’accordent et se désaccordent. Il mène le jeu le plus souvent car j’essaie de le retrouver, entre ce qu’il joue et sa voix, mais il essaie également de s’ajuster lorsque je tente de le stabiliser (hauteur et intensité) et de le faire revenir de cet état de quasi transe (il se balance de plus en plus fort) où il semble entrer. Le début de la séance Il arrive très excité, il parle du Père Noël, et vient me serrer très fort lorsque, commentant avec sa mère que ce n’est pas le moment, je lui précise que ce pourrait être qu’il désire quelque chose très fort. Il vient alors m’embrasser une deuxième fois de la façon que j’ai décrite. Il entre ensuite dans la pièce où nous travaillons et se précipite sur l’échelle en affirmant qu’il va y monter (s’il avait peur les autres fois, il avait réussi à passer de 3 à presque 4 barreaux). Rien n’y fait, il ne peut me rejoindre au delà de 3 barreaux, même avec sa mère derrière lui, il est vraiment paralysé par la peur. Nous prenons le « calendrier » aimanté avec magnets pour rechercher les activités du lendemain et resituer ainsi le temps à partir de “ici et maintenant” et du futur. Il veut à tout prix y placer le Père Noël. Sa mère détourne son attention en évoquant le train qu’il va prendre pour aller chez Mamie, je cache le magnet et range le panneau. Il refuse toute activité où il pourrait montrer à maman ce qu’il sait faire maintenant (cactus, coccinelle) jusqu’à ce que je lui propose la boite du scéno-test (cf. matériel). Le contexte est ainsi posé : désir, peur, violence... comment lui permettre de s’exprimer dans un autre registre et de réussir à se contrôler ? Scéno-test et Jeu symbolique Un premier temps se marque dans le champ cognitif : il fait des expériences avec les cubes pour réaliser ce qui pourrait correspondre à une maison, mais « en plein » alors que l’année précédente il avait travaillé autour du thème « maison » avec murs, portes, circulation jusqu’à, dernière expérience, y empiler en vrac tous les personnages. Nous n’avions pas repris depuis le scéno-test. Ce jour là, il compare manifestement les éléments entre eux, les classe et les ajuste, explore leurs qualités et les possibilités de combinaison pour obtenir cette forme parallélépipédique. Sa mère est présente et je lui ai commenté ce que j’observais. Il explore ainsi comment faire du remplissage avec des éléments différents dans une extrême concentration qui se marque par le “clic” (comme occlusif postérieur mais qui se prolonge en continu, d’arrière nez ?) qui joue chez lui le rôle d’un « objet transitionnel » (endormissement, gros chagrin etc.). Il commence à sortir des personnages pendant que je m’absente quelques instants, sa mère est présente. Le jeu proprement dit commence, que va-t-il exprimer ? A mon retour, il a sorti la vache, le lutin (selon sa mère mais je le code en Père Noël) et la fait aller vers lui. Puis il prend le train jouet, le fait circuler avec l’onomatopée "tut tut tut". Il déplace le lutin. Je demande où il va ? Il le fait aller vers le bonhomme de neige (contexte du Père Noël ? mais aussi manifestation de quelque chose de froid, sans émotions ?) Il n’a sorti aucun personnage mais manipule des "symboles" (représentants symboliques), les faisant entrer en relation. On peut penser qu’il reprend ainsi la relation établie entre l’expression d’un désir et le "Père Noël", hypothèse qui va se confirmer dans la façon dont nous continuerons à jouer... • Il prend le sapin, essaie de le faire tenir debout, une femme, le crocodile et s’en sert pour casser la "maison" comme avec rage, puis commence à agresser la femme avec... Je me décide alors à intervenir sous forme de question : "une dame qui ? une maîtresse, une maman, une orthophoniste comme Jacqueline ? Il prend alors le lasso à la place du crocodile et menace la vache avec. On est donc passés d’une mise en scène d’agression directe, mime en quelque sorte dans le champ du fictif d’un jeu mais avec l’expression d’une violence telle qu’il ne peut avoir de valeur cathartique, on est passé à l’expression d’un désir fantasmatique, par symboles interposés : le serpent évoquant le désir sexuel et la vache, un personnage féminin. J’interviens de nouveau en transformant le "lasso" (fil de fer) agresseur, en "laisse", avec des gestes mesurés, tout en parlant avec calme, pour lui suggérer ainsi en gestes et en paroles, qu’il peut y avoir d’autres modalités relationnelles. Il laisse alors le jeu en plan et va chercher, à l’autre bout de la table, le petit ours vibreur. Il reprend sa place et le pose contre ses deux joues, entre les deux joues, pour ressentir le plaisir de la vibration, puis le fait ressentir à sa mère puis à moi-même en nous rejoignant tour à tour à notre propre place. Le passage à l’expression des pulsions dans ce nouveau champ symbolique, plus archaïque, ne pouvait trouver d’issue sauf à être transposé dans un autre langage. La vibration (émotion) et le partage émotionnel... avec un objet transitionnel. • Il va ensuite dans le coin musique et sort un nouveau xylophone s’exerçant à taper très fort dessus. Il découvre ce nouveau matériel.
Un mot de la séance suivante. Pendant que sa mère va lire le début de ce compte-rendu dans la pièce voisine, il se plante en bas de l’échelle. Il voudrait manifestement y monter. Je me contente de le regarder de ma place habituelle. Il me regarde également, comprend qu’il est livré à lui-même, essaie en vain de décoller un pied puis l’autre, toujours silencieux, évalue la situation et décide de ne pas essayer davantage, sans m’appeler pour autant : il n’est pas prêt mais accepte de ne pas être "aidé".
[1] il s’agit d’un ballon qu’on trouve habituellement dans des salles de kiné, sur lequel les enfants cherchent à trouver un équilibre plus ou moins stable. |
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